On retient volontiers le congrès de mai 1909 comme acte de naissance de notre Fédération. Pour autant, celui-ci est le fruit d’un processus historique qui plonge ses racines jusqu’au XVIIIe siècle, avec l’émergence des futurs bastions de la sidérurgie et, en parallèle, l’affirmation du compagnonnage, ces associations d’ouvriers suffisamment puissantes pour engager des grèves et imposer des salaires.
La Révolution française marque une rupture, en interdisant les coalitions et les grèves par la loi Le Chapelier (1791). Au nom des principes de liberté et d’égalité, ouvriers et patronat sont donc privés de leur droit de s’organiser, même si la répression tend à ne frapper que les premiers. En riposte, des « sociétés de secours mutuels » apparaissent, d’abord cantonnées à la prise en charge de la maladie, de l’accident ou encore du chômage, avant de se charger peu à peu, sous le nom de « sociétés de résistance », de représenter les ouvriers et de défendre leurs revendications.
L’émergence du syndicalisme
La France reste essentiellement rurale et il faut attendre la seconde moitié du XIXe siècle pour que la Révolution industrielle s’impose. Le développement économique quadruple le nombre de salariés en vingt ans, tandis que la production se concentre.
Les luttes se multiplient, tout comme les premières chambres syndicales, à l’image de celles des métallurgistes de Grenoble (1866), des mécaniciens de Paris (1868) ou des mouleurs de fer d’Amiens (1869). Les catalyseurs sont pluriels : tournant libéral du Second Empire de Napoléon III qui tolère un droit de grève très encadré à partir de 1864, les mauvaises conditions de travail, les bas salaires, l’arbitraire patronal, mais aussi les contacts pris lors des Expositions internationales et au sein de l’Association internationale des travailleurs (AIT) fondée en 1864.
La répression qui met fin à la Commune de Paris en 1871 brise net cette dynamique syndicale. Les pertes sont considérables, entre les exécutés, les déportés ou ceux contraints à l’exil. Malgré tout, le syndicalisme relève la tête, comme chez les ouvriers du bronze parisien ou les mouleurs et fondeurs en fer et cuivre de Nantes.
Vers une fédération unique d’industrie
À la suite du premier congrès ouvrier de France (1876), qui impulse la structuration progressive du mouvement ouvrier entre partis politiques et syndicats, et une polarisation accrue entre courants réformistes, marxistes et anarchistes, l’Union corporative des ouvriers mécaniciens de la Seine prend l’initiative de convoquer le premier congrès national de la métallurgie en octobre 1883.
Cette première tentative d’unification, n’ayant pas aboutit à une structure pérenne, fut suivie d’une seconde, avec la création de la « Fédération nationale des ouvriers métallurgistes de France » en février 1890. Bien que défendant le principe d’une fédération d’industrie regroupant l’ensemble des métiers de la métallurgie, elle ne parvient pas à le mettre en pratique, en dépit de sa transformation en « Union fédérale des ouvriers métallurgistes » en 1899.
Au seuil du XXe siècle, chaque corporation conserve donc sa propre fédération. Mouleurs, ouvriers du cuivre, mécaniciens, modeleurs, chauffeurs-conducteurs, ouvriers de la voiture, ouvriers maréchaux, bijoutiers-orfèvres, ferblantiers-boitiers, un vrai inventaire à la Prévert !